Avancement du comité de négociation sur l’examen doctoral
Réuni-e-s en assemblée générale le 8 février 2024, les membres de l’Association étudiante des cycles supérieurs en science politique et droit de l’UQAM (AECSSPD) se sont positionné-e-s en faveur de l’abolition de l’examen doctoral et ont pris la décision d’imposer un ultimatum à la direction de programme de doctorat en science politique pour réformer celui du département de science politique. Faute de réponse à cet ultimatum, l’AECSSPD envisage une grève générale reconductible qui pourrait être déclenchée à la suite d’une assemblée générale de grève durant la semaine du 11 mars 2024.
L’ultimatum de l’AECSSPD demande que, pour l’examen doctoral de science politique, il y ait
- une variété de formats et de modalités d’examen offerte (en laboratoire, à distance synchrone, examen maison, etc.),
- Des critères d’évaluation clairs (qui peuvent être différenciés selon le type d’examen),
- La possibilité d’avoir un aide-mémoire lors d’examens en laboratoire ou à distance synchrone,
- La possibilité d’user de logiciels de traduction et d’aide à la rédaction comme Antidote.
- La négociation des listes de lectures entre la partie étudiante et la partie professorale.
Comité de négociation
Les membres ont aussi pris soin d’élire un comité de négociation afin d’arriver à une entente de réforme de l’examen doctoral avec la direction de programme de doctorat en science politique.
Le 13 février, le comité de négociation envoyait un courriel à la directrice des études de troisième cycle, Carole Clavier, expliquant l’ultimatum et demandant une rencontre avec la directrice.
Mme Clavier a répondu que seul le Comité d’orientation de programme de troisième cycle en science politique (COP) est habilité à effectuer une telle réforme. Mme Clavier ajoute qu’elle ne peut agir en dehors du COP en ce sens. Elle ajoute que le prochain COP est prévue pour le 6 mars pour faire le point sur la mise en œuvre de la nouvelle formule combinée des examens majeurs et mineurs et des mesures d’accompagnement déployées depuis un an et demi.
Malgré tout, Mme Clavier a offert « de rencontrer de façon informelle les étudiants au doctorat en science politique membres de l’AECSSPD pour répondre à (leur) questions sur les examens de synthèse et le processus de modifications de programmes à l’UQAM ». Faute de disponibilités ultérieures, le comité de négociation de l’AECSSPD rencontrera Mme Clavier le 5 mars à 10 h, soit la veille de la séance du COP.
Proposition pour le COP du 6 mars 2024
Dans ce contexte, le comité de négociation de l’AECSSPD a rédigé une proposition pour le COP du 6 mars afin d’adopter les revendications pour la réforme du programme de doctorat lors de cette instance. La proposition du comité est la suivante :
Il est proposé que le comité d’orientation de programme du doctorat en science politique :
PERMETTE l’utilisation d’un aide-mémoire lors de l’examen écrit, ainsi que l’utilisation de logiciels de traduction et de logiciels d’aide à la rédaction comme Antidote,
APPROUVE des critères d’évaluations clairs (par exemple sous la forme d’une grille à échelle descriptive) à temps pour les examens de synthèse prévus pour la session Hiver 2024,
S’ENGAGE à ce que les examens de synthèse au terme de la prochaine révision du programme incluent une variété de formats et de modalités de passation et reposent sur des listes de lecture négociées entre la partie étudiante et la partie professorale.
Cette proposition a été partagée avec la direction de programme afin que les discussions lors du COP du 6 mars partent sur les mêmes bases.
L’examen doctoral en science politique : une épreuve arbitraire et inutile
L’examen de synthèse en science politique consiste en la lecture d’environ 10 000 pages de texte en 2 ou 3 trimestres. À la suite de ce bourrage de crâne, un examen écrit, puis un examen oral sont subis. Cette formule adoptée en 2022, qui est présentée comme nouvelle par les professeur-e-s, est en fait une version écourtée de ce qui se déroulait depuis déjà plusieurs années. Elle répond à l’échec de la moitié d’une cohorte entière. La seule véritable modification qui a été faite : le retrait de la possibilité de faire un examen maison.
Malgré des améliorations dans l’accompagnement des doctorant-e-s depuis 2022, et ce, en raison de la bonne volonté de certaines professeures, l’examen doctoral de synthèse demeure une épreuve qui laisse place à l’arbitraire en raison de l’absence de critères d’évaluation clairs, qui est inéquitable en raison de problèmes d’accessibilités et de format, et qui n’a pas la valeur pédagogique prétendue.
Alors que l’UQAM se targue d’être une université qui favorise l’accès aux études, l’examen de synthèse tel qu’on le connait aujourd’hui pose des limites sérieuses à l’inclusivité et l’accessibilité universelle du programme doctoral de science politique :
- Plusieurs personnes étudiantes choisissent de ne pas s’inscrire au programme de doctorat en science politique à l’UQAM et s’inscrivent plutôt à des programmes où l’examen de synthèse est plus simple, voire absent, comme c’est le cas pour le doctorat en sociologie de l’UQAM.
- En 2022, dix personnes sur 20 ont échoué et, sur ces dix, huit provenaient de l’international. En ce sens, l’examen de synthèse reproduit ainsi des discriminations systémiques.
- L’examen de synthèse contribue à la non-collégialité de la gestion des études et est la seule évaluation qui ne fait pas l’objet d’une entente explicite entre la partie étudiante et la partie professorale.
- La recherche contemporaine en pédagogie montre bien que ce qui est évalué par ce genre d’examen est la capacité à mémoriser, alors qu’il sert supposément à « faire preuve de sa capacité de présenter une introduction à un champ de la science politique ».
D’ailleurs, la plupart des recherches sur les examens doctoraux montre que
- Il n’est pas évident que les pratiques qui régissent les examens de synthèse soient arrimées aux objectifs éducatifs affichés.¹
- « L’utilisation de l’examen traditionnel », comme celui de doctorat en science politique, « avait la corrélation la plus faible avec la performance du programme, alors qu’une approche centrée sur la recherche », comme l’examen doctoral de droit à l’UQAM, « avait la meilleure ».²
- L’idée selon laquelle l’examen doctoral transmet un bagage commun aux étudiant-e-s est erronée. L’analyse de 16 listes de lecture d’examens de synthèse en politique canadienne montre qu’il n’y a pas réellement de « canons » couvert par les examens de synthèse vue la variation entre le contenu de chacun d’entre eux. Le présupposé selon lequel les examens préparent les étudiant-e-s à avoir le vocabulaire nécessaire pour enseigner, communiquer et collaborer est à tout le moins douteux.³
¹ Joseph A. Schafer et Matthew J. Giblin, « Doctoral Comprehensive Exams: Standardization, Customization, and Everywhere in Between », Journal of Criminal Justice Education, vol. 19, nᵒ 2, Routledge, juillet 2008, p. 275‑289, en ligne, <doi : 10.1080/10 511 250 802 137 648>.
² Patti Weir et al., Re-Imagining PhD: Doctoral Comprehensive Exam. The Comprehensive Examination – Rooted in History, Consultation Document, Ottawa, Canadian Association for Graduate Studies, septembre 2017, p. 7.
³ Nicole McMahon, Christopher Alcantara et Laura B. Stephenson, « The Qualifying Field Exam: What Is It Good For? », PS : Political Science & Politics, vol. 53, nᵒ 1, janvier 2020, p. 94‑99, en ligne, <doi : 10.1017/S1049096519001100>.